L’ARPE : aux fondations du dialogue social entre plateformes et travailleurs indépendants

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Il y a enfin un pilote dans l’avion ! Alors que les plateformes imposaient jusqu’alors en toute impunité leur modèle économique, faisant généralement fi des droits sociaux, une autorité commence, en France, à réguler concrètement la situation : l’ARPE

Les premières pierres de cet établissement public, baptisé Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi, ont été posées par une ordonnance du 21 avril 2021.

 L’ARPE a pour mission d’instaurer un dialogue social entre les plateformes et les travailleurs indépendants dans le secteur des VTC et des livraisons à vélo ou scooter. 

Son objectif ? Améliorer les droits et les conditions de travail des indépendants qui travaillent via les plateformes. Le travail de négociation entre les différents acteurs a commencé à porter ses fruits, avec un premier accord signé le 18 janvier 2023, instaurant pour tous les chauffeurs VTC un minimum net chauffeur de 7,65 € par course. Et le travail continue…

Qui officie à l’ARPE ?

Cet établissement public, sous la double tutelle du ministère chargé du travail et du ministère chargé des transports, s’articule autour de 2 entités principales au caractère pluripartite :

  • un Conseil d’administration ;
  • un Conseil des acteurs de plateformes. 

À la tête de l’ARPE

La gouvernance de l’ARPE est assurée par le président du conseil d’administration. A la suite de M. Bruno Mettling (président fondateur de Topics, un cabinet de conseil stratégique en ressources humaines, management et organisation et autrefois DRH du groupe Orange), a été nommé par décret du 13 septembre 2023 M. Michel YAHIEL (diplômé de l'IEP et de l'ENA, il a occupé de nombreuses fonctions au sein des administrations françaises).

La direction générale est assurée par M. Joël Blondel (inspecteur général des affaires sociales) également nommé par décret en 2021 pour 4 ans.

Le conseil d’administration 

Ses membres réunissent les principaux acteurs du secteur :

  • des représentants de l’Etat ;
  • des représentants des organisations de travailleurs représentatives du secteur ; 
  • des représentants des plateformes ;
  • des experts dans le domaine de l’économie numérique, du dialogue social ou du droit commercial.

Le conseil des acteurs des plateformes

Le conseil des acteurs des plateformes s’appuie lui aussi sur la pluralité de ses membres : 

  • représentants des organisations de travailleurs et de plateformes d’emploi ;
  • représentants des travailleurs de plateformes ;
  • représentants des plateformes ;
  • associations de défense des consommateurs et des usagers ;
  • clients professionnels recourant aux services proposés par les plateformes d’emploi ;
  • représentants des associations d’élus locaux ;
  • experts du numérique, des transports et du dialogue social.

Le financement de l’ARPE

Les activités de l’établissement sont financées, comme spécifié dans l’Article 300 bis du Code du travail par la taxe sur la fourniture de services de mise en relation « des personnes par voie électronique correspondant à l’activité des plateformes pour le transport de passagers en voiture de transport avec chauffeur, la livraison de marchandises au moyen de véhicules à deux ou trois roues ; le transport réalisé par un travailleur indépendant et où l’exploitant du service de mise en relation détermine les caractéristiques et le prix de l’opération économique ou de l’opération de transport ».

Ses missions 

Ses missions sont clairement explicitées par l’article L-7345-1 du Code du travail : « réguler le dialogue social entre les plateformes… et les travailleurs qui leur sont liés par un contrat commercial, notamment en assurant la diffusion d’informations et en favorisant la concertation ».

Pour remplir sa mission, l’ARPE s’investit sur plusieurs grands axes : 

Organiser des élections nationales 

Ces élections nationales sont destinées à élire des représentants des travailleurs indépendants des plateformes. L’ARPE s’appuie sur les conditions fixées par l’article L7343-3 qui définit les règles évaluant la représentativité des organisations se présentant pour porter la voix des travailleurs. 

Les premières élections

Les premières élections ont eu lieu du 9 au 16 mai 2022. Les prochaines élections se tiendront en 2024, puis tous les 4 ans. Chaque organisation élue désignera trois représentants en charge de participer aux négociations.

La FNAE est arrivée première du scrutin chez les livreurs et a été élue également chez les VTC.

Les représentants élus par les livreurs

Représentants élus pour le secteur des activités de livraison de marchandises au moyen d’un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non :

– la Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (FNAE) : 33,97 % ; – la Confédération générale du travail (CGT) : 32,58 % ; 

– UNION-Indépendants : 26,66 % ; 

– la Fédération SUD commerces et Services (SUD Commerces) : 6,79 %. 

Les représentants élus par les VTC

– l’Association des VTC de France (AVF) : 42,81 % ;

– UNION-Indépendants : 11,51 % ; 

– l’Association des Chauffeurs indépendants lyonnais (ACIL) : 11,44 % ; 

– Force ouvrière (FO) : 9,19 % ; 

– la Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (FNAE) : 8,98 % ; 

– la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) : 8,84 % ; 

– l’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) : 7,23 %.

Financer la formation des représentants 

L’ARPE permet de financer des formations au dialogue social pour les représentants désignés. Elle assure également l’indemnisation des jours de formation et des heures de délégation assumées par les travailleurs indépendants dans le cadre de leur mandat.

Protéger les travailleurs indépendants représentants

L’ARPE a aussi vocation à protéger les indépendants dans le cadre de leur mandat de représentants : comme tout délégué syndical, un travailleur indépendant ne peut être évincé par la plateforme avec laquelle il travaille juste avant, pendant et 6 mois après sa nomination en tant que représentant. Toute rupture de contrat de travail doit être avalisée par l’ARPE.

Une baisse d’activité susceptible d’être liée au mandat de représentant peut constituer un motif de recours auprès d’un tribunal judiciaire.

Accompagner le développement du dialogue social 

L’ARPE est chargée de mettre en œuvre des règles de négociation entre les représentants. 

Jouer un rôle d’observatoire 

L’ARPE joue aussi un rôle d’observateur de l’activité des plateformes numériques, dont l’usage des algorithmes et la gestion des données personnelles.

À partir des données collectées, elle élabore des études et rapports statistiques sur l’activité des plateformes. Elle peut aussi émettre des avis et préconisations et développer une expertise concernant les droits sociaux pour les travailleurs de plateformes.

Assurer une médiation 

En cas de différend entre plateformes et travailleurs indépendants, l’ARPE est habilitée à assurer une fonction de médiateur. (Médiation [Articles L7345-7 à L7345-12)

L'ARPE peut être saisie gratuitement, soit par une plateforme soit par un représentant des travailleurs.

Homologuer les accords de secteurs

L’ARPE est aussi en charge d’homologuer les accords de secteurs obtenus par les négociateurs. Elle dispose du pouvoir de modifier ces accords de façon à respecter les dispositions légales, comme précisé dans l’article L7343-51 du Code du travail.

L’article L7343-36 définit le rythme et le contenu des négociations :

  • au moins une fois par an au niveau du secteur ;
  • sur un ou plusieurs des thèmes suivants (liste non exhaustive) :
  1. “Les modalités de détermination des revenus des travailleurs, y compris le prix de leur prestation de service ;
  2. Les conditions d'exercice de l'activité professionnelle des travailleurs, et notamment l'encadrement de leur temps d'activité ainsi que les effets des algorithmes et des changements les affectant sur les modalités d'accomplissement des prestations ;
  3. La prévention des risques professionnels auxquels les travailleurs peuvent être exposés en raison de leur activité ainsi que les dommages causés à des tiers ;
  4. Les modalités de développement des compétences professionnelles et de sécurisation des parcours professionnels.”

Page facebook de l’ARPE